UFC 285: Jon Jones l’homme, le côté obscur de sa force (2024)

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Trois ans après son dernier combat, Jon Jones revient dans l’octogone de l’UFC ce week-end à Las Vegas dans un combat pour la ceinture des lourds face à Ciryl Gane (en direct à partir de 2h dans la nuit de samedi à dimanche sur RMC Sport 2). Légende du MMA, l’Américain est aussi un homme torturé par de nombreux démons qui ont émaillé son parcours autant que ses exploits sportifs. Focus sur le côté obscur de "Bones".

Quelques mots comme une prémonition. Âgé de vingt-trois ans, Jon Jones va en ce mois de mars 2011 devenir le plus jeune champion de l’histoire de l’UFC en mettant TKO le Brésilien Mauricio "Shogun" Rua pour le titre des lourds-légers. Quelques jours avant, "Bones" s’interroge au micro: "Comment je vais réagir si je deviens champion? Cela va être un test pour savoir qui je suis vraiment. Je ne veux jamais rien faire qui fasse de mal à l’image de notre sport." Raté.

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Douze ans plus tard, alors qu’il fait son retour aux affaire le week-end prochain à Las Vegas après trois ans loin de l’octogone pour tenter de conquérir la couronne des lourds face à Ciryl Gane dans l’affiche principale de l’UFC 285, choc qui peut être vu comme le plus grand combat de l’histoire du sport français, celui qui a régné sans partage ou presque sur les mi-lourds pendant près de dix ans est considéré par beaucoup comme le meilleur combattant de l’histoire de l’UFC, organisation mastodonte du MMA mondial. Mais pour d’autres, il ne peut plus prétendre au trône. Trop de casseroles au compteur.

UFC 285: Jon Jones le champion, le côté clair de sa force

Etudier le parcours de Jon Jones verse dans l’interrogation philosophique: faut-il séparer l’homme de l’artiste (martial)? A la base, l’ancien lutteur passé pro en MMA à 19 ans pour assumer le futur avec sa compagne enceinte avait pourtant tout pour plaire. Un combattant unique, créatif. Le meilleur de tous, disait-on souvent. Difficile d'argumenter contre. Après Rua, les grands noms écartés se ramassent à la pelle : Quinton Jackson, Lyoto Machida, Rashad Evans, Vitor Belfort, Chael Sonnen, Alexander Gustafsson, Glover Teixeira et Daniel Cormier. Peu l'ont embêté. Un seul, Gustafsson, l'a fait vaciller. Trop fort. Le tout en jouant le rôle du "bon garçon".

Fils d'un assistant pasteur d'Endicott, dans l'Etat de New York, et d'une mère elle aussi active à l'église et qui s'occupait de déficients mentaux (décédée en 2017), Jones cite la Bible dans ses tweets, poitrine tatouée d'un de ses versets. Gendre idéal. Et aimant à sponsors, à l’image de Nike qui ne se fait pas prier pour le signer. Mais la façade puritaine va s’écrouler pierre après pierre. Il y a une première arrestation en novembre 2011, sur le parking d’un club à striptease à Albuquerque (Nouveau-Mexique), la ville où il vit et s’entraîne, après un contrôle de police.

Quelques mois plus tard, en mai 2012, sa Bentley termine dans un poteau de ligne téléphonique à Binghamton (New York). Arrêté pour conduite en état d'ivresse, il écope de 1000 dollars d'amende et doit suivre une cure. Deux ans et demi plus tard, en décembre 2014, c'est un contrôle positif qui l'ébranle, à la cocaïne et hors compétition, résultat révélé peu après sa victoire sur décision unanime sur Cormier à l'UFC 182 en janvier 2015 et qui l'obligera à se rendre en clinique de désintoxication. Vacciné ? Oh que non.

En avril 2015, celui qui est "son propre pire ennemi" (dixit son père Arthur) grille un feu rouge au volant d'un SUV Buick de location. La collision implique trois voitures dont celle d'une femme enceinte, qui se casse le bras sur le coup. Jones fuit la scène à pied avant de revenir dans sa voiture pour, selon des témoins, y ramasser du cash avant de repartir. Il avouera lui-même qu'il y cherchait sa "pipe de marijuana", dénichée par la police avec un peu d'herbe. Il se retrouve sous période probatoire et doit effectuer des travaux d’intérêt général.

Côté UFC, sa ceinture lui est retirée, une suspension indéterminée infligée. Cormier prend sa place lors du combat principal de l'UFC 187 en mai 2015, contre Anthony Johnson, et remporte le titre des lourds-légers. La descente aux enfers continue. En mars 2016, alors qu'il a déjà été pris pour conduite sans permis et avec défaut d'assurance en janvier, Jones est arrêté au volant d’une Chevrolet Corvette à Albuquerque. Le policier lui reproche d'avoir montré l'intention de vouloir faire la course avec sa voiture en faisant du bruit avec son moteur à un feu. Jones s'en défend avec véhémence, affirmant faire cela pour un fan.

Problème? La scène est filmée par les autorités qui vont dévoiler la vidéo. Où l'on peut l'entendre dire à un représentant des forces de l'ordre: "Vous êtes un putain de menteur. (...) Un porc." L'incident brise sa période probatoire de dix-huit mois conséquence de l'accident d'avril 2015. Outre soixante nouvelles heures de travaux d’intérêt général, il passe trois jours au Metropolitan Detention Center du Comté de Bernalillo (Nouveau-Mexique). "C'était une expérience terrible qui m'a fait comprendre que je considérais trop ma vie comme acquise", confiait-il en 2017 au site Bleacher Report. Il n'en a pas pour autant fini avec son exploration du côté obscur.

Il revient dans la cage en avril 2016, une victoire sur Ovince St. Preux pour la ceinture intérimaire des mi-lourds. Dans la foulée, alors qu'il doit affronter Cormier à l'UFC 200 pour désigner le champion unifié, c'est un contrôle positif à deux substances interdites (clomiphène et létrozole) qui fait dérailler le train. Il expliquera avoir pris du tadalafil, molécule contre le dysfonctionnement érectile. Des "pilules pour la b...", lâche-t-il sans fard lors de son audition. Suffisant pour convaincre qu'il n'avait pas sciemment pris une substance interdite et éviter une sanction trop lourde. Mais son imprudence lui vaudra une nouvelle année de suspension. Dana White, patron exécutif de l'UFC, promet qu'on "ne le reverra jamais plus dans le combat principal" d'une soirée de l'organisation.

Chaque fois, Jones a promis de changer. Chaque fois, il a replongé, junkie de la controverse. Et ce n’est pas fini. De retour dans l’Octogone en juillet 2017 pour retrouver Cormier, il le met KO et récupère ce qu’il considère comme sa ceinture. Mais un mois plus tard, l’USADA (agence antidopage américaine) rend public son contrôle positif à un stéroïde, le turinabol, dont des traces ont été retrouvées dans son corps la veille du combat. Sa victoire devient un "no contest" et le titre lui est retiré, rendu à Cormier. Il écope également de quinze mois de suspension, peine d’abord plus haute (on parlait de deux à quatre ans) mais réduite pour avoir "aidé" l’USADA dans sa bataille contre le dopage (il promet n'avoir balancé personne).

De retour pour affronter Gustafsson pour le titre des mi-lourds (abandonné par Cormier) à l’UFC 232 en décembre 2018, on se dit que la chose n’arrivera plus. Raté. A quelques jours de l’événement, l’USADA annonce avoir trouvé une nouvelle trace de turinabol – 60 picogrammes par millilitre contre 80 en juillet 2017, des taux qui ne le rendraient pas positif aujourd’hui – lors d’un contrôle. Les experts de l’USADA concluent à un résidu de ce qui avait été trouvé dans son corps en 2017, ce qui arrange bien ses affaires et celles de l’UFC, et le combat a lieu. Avec un hic: l’UFC doit relocaliser son événement, quelques jours avant, de Las Vegas à Los Angeles, la commission athlétique du Nevada refusant de donner une licence à Jones avant d’avoir entendu ses explications.

A l’époque, "Bones" s’assume enfin. Il reconnaît ses excès, la co*ke, l’herbe, l’alcool, et même son côté vicieux dans la cage (doigts dans les yeux des adversaires). "Je voulais représenter une certaine image pour les autres, explique-t-il à ESPN. Mais je suis revenu au fait de ne pas me soucier d’être quelqu’un pour quelqu’un d’autre. (…) Je ne veux pas être vu comme un méchant garçon mais je n'essaie pas non plus d'être Mère Teresa. Je veux juste être moi-même. Je n'ai plus la force de faire semblant." Quelques mois plus tôt, à l’été 2018, il s’était rendu pour trente jours dans un institut spécialisé dans la désintoxication et la gestion des traumatismes en Floride. "Je devais réapprendre à m’aimer en tant que père, en tant que mari, en tant que frère et en tant qu’ami. J’ai dû redevenir Jonathan Jones et apprendre à le différencier de Jon Bones Jones. Et c’est à ce moment-là que je suis redevenu heureux."

Pour continuer à l’être, celui qui craint de voir ses enfants subir les conséquences de ses erreurs à l’école a ensuite vu un psychothérapeute trois fois par semaine. Qui lui a appris à mieux aimer ce qu’il est et à le reconnaître face au public. "Je bois toujours, et je fume des joints de temps en temps, surtout le week-end. Mes coaches le savent, j’en ai fini avec l’époque où je cherchais à me cacher... Je voulais atteindre la sobriété totale, c’est ce que je visais en allant en cure, mais je ne suis pas prêt pour ça. Ce n’est pas qui j’étais et ce n’est pas qui je suis. J’ai atteint un stade où je peux être honnête avec moi-même."

Accusé d’être un tricheur par plusieurs adversaires, on peut les comprendre quand on connaît l’anecdote qui l’a vu un jour… se cacher sous un ring pour éviter un contrôle antidopage, celui qui clame ne "jamais avoir pris volontairement" le moindre produit dopant (il se balade toujours avec sa propre bouteille d’eau et essaie de "ne pas être prévisible" sur les endroits où il mange de peur que sa boisson ou ses aliments ne soient contaminés à son insu) annonce alors que "la tempête est derrière (lui)". Jon Jones ne veut plus "jeter (s)on talent par la fenêtre". On le croit sur le chemin de la rédemption. Mais la rechute arrive vite.

En avril 2019, une strip-teaseuse l’accuse de l’avoir étranglé, embrassé contre son gré et d’avoir touché ses parties intimes dans un club à Albuquerque. Une histoire pas inscrite dans son casier après un accord et une période de quatre-vingt-dix jours sans "bêtise". Onze mois plus tard, en mars 2020, après deux nouvelles défenses de son titre contre Thiago Santos et Dominick Reyes, il est encore arrêté pour conduite sous alcool et utilisation d’une arme à feu dans la rue. Amende, travaux d’intérêt général et période probatoire sont encore au programme. Jones abandonne sa ceinture des mi-lourds et se tourne vers une montée chez les lourds annoncée depuis des années. Des bisbilles contractuelles avec l’UFC retardent la chose. Lui reste fidèle à son personnage.

En septembre 2021, quelques heures après l’introduction au Hall of Fame de l’UFC de son combat contre Gustaffson de septembre 2013, dans un week-end où des témoins présents sur place racontent combien il était festif (dans tous les sens du terme, dont les mauvais) il est arrêté à Las Vegas pour violence conjugale. Avant de frapper la voiture de police avec sa tête – il a dû payer les dégâts – alors que des menottes le retiennent. "Ce gars a beaucoup, beaucoup de démons", soupire Dana White, gavé. Quatre jours plus tard, "Bones" annonce arrêter l’alcool pour de bon. On a le droit de ne pas le croire… A commencer par ses mentors.

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En octobre 2021, il est dégagé de la salle Jackson Wink MMA Academy, où il s’entraîne depuis des années. Greg Jackson, son coach, accepte de continuer à le suivre dans une salle annexe. Mais avec une condition: "Garder une vie saine et positive". L’a-t-il fait? Vu ses états de service, on peut en douter. "Vous ne pouvez rien promettre dans la vie, souriait-il il y a trois ans. Vous ne savez pas quels virages elle va mettre sur votre chemin." Après tant de montagnes russes, le sien passe désormais par Ciryl Gane. Une marche de plus dans ce qui l’a toujours animé: marquer encore un peu plus l’histoire de son sport. Sans jamais effacer la sienne et ses soubresauts.

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https://twitter.com/LexaB Alexandre Herbinet Journaliste RMC Sport

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